À la croisée des chemins et des pratiques botaniques des médecins-naturalistes pré-linnéens, entre le XVIe et le début du XVIIIe siècle

L’usage du terme «alpin» existe déjà au XVIe siècle concernant les plantes d’altitude puisque les médecins-naturalistes de la Renaissance qui parcourent la ceinture alpine font un relevé de certaines plantes qu’ils rencontrent sur le chemin qu’empruntent tous ceux qui étudient un temps la médecine à l’université de Montpellier, de Padoue ou de Bologne. Le territoire alpin devient un important carrefour et lieu d’observations où se fabriquent des savoirs pré-linnéens: de Leonhart Fuchs, à William Turner en passant par Jacques Daléchamps, tous s’interrogent sur des flores locales qu’ils sont amenés à apercevoir par sérendipité sur les routes escarpées, collineuses et difficiles entre la France, l’Italie, la Suisse et l’Allemagne. Les réflexions et observations des médecins-naturalistes de l’époque moderne portent sur les milieux rocailleux ou boisés, parfois sur la rareté ou sur les usages traditionnels médicinaux et alimentaires constatés dans des régions alpines. Ces savoirs sont transposés dans les espaces alpestres par d’autres praticiens comme les naturalistes John Ray ou John Hill pour les massifs montagneux italiens ou anglais, tels que les monts de Lake District, suggérant ainsi que certaines plantes n’ont pas les mêmes caractéristiques ou vertus que la flore de basse altitude, sur ce que nous appelons aujourd’hui l’étage alpin. La production de ces savoirs sur la physiologie et la nature des végétaux est souvent reprise dans les journaux scientifiques et les traités de botanique et viennent nourrir la pensée scientifique de la fin du XVIIIe siècle. La question d’une végétation spécifique aux montagnes reste pourtant peu étudiée pour elle-même mais elle étonne et apporte de nouvelles perspectives environnementales, l’étage alpin étant resté jusque-là réputé plutôt infranchissable et hostile.

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